L'avis d'un utilisateur sur le Nikon Z6
Entretien avec Hervé Bellenger, reporter-photographe
31 décembre 2018 par Hervé Bellenger/ entretien Thierry Philippon - Mis à jour le 01 février 2019
Hervé Bellenger est reporter-photographe spécialisé dans le Basketball depuis une vingtaine d'années. Il travaille également dans la Voile, domaine pour lequel il réalise des sujets texte et photo, des vidéos et des captations en drone. Possesseur d'un Nikon D750, il fait partie des défricheurs à avoir acquis le très ambitieux appareil hybride Nikon Z6. Contacté par magazinevideo, site dont il est visiteur régulier, il a bien voulu répondre à plusieurs questions photo et vidéo que nous lui avons posées. Propos recueillis par Thierry Philippon. © photos : Hervé Bellenger. |
|
|
|
Magazinevideo : Vous possédez depuis peu le Nikon Z6. Etiez-vous déjà familier des appareils sans miroir avant cette acquisition ?Hervé Bellenger : J'ai tout d'abord acheté un Panasonic G1 par curiosité puis un GH3 dès sa sortie et enfin un Lumix G9. J'ai été très vite convaincu par les performances, la polyvalence et la compacité de ce matériel pour certains types de sujets. |
|
MV : Avec le Z6, vous comptez shooter en photo et vidéo dans quelles proportions respectives ?H.B.: Je shoote beaucoup plus en photo qu'en vidéo mais la proportion a une importance relative car mes clients savent qu'ils peuvent compter sur moi en cas de besoin pour des petites captations. Il arrive fréquemment que l'on me demande des reportages mêlant photo et vidéo et drone. MV : Qu'appréciez-vous sur cet appareil par rapport à un reflex classique ?H.B.: Un hybride a de nombreux avantages : sa visée qui permet d’apprécier en temps réel la justesse de ses réglages et de modifier ses paramètres sans quitter l’oeil du viseur. La cadence de 12 images / secondes. En sport c’est indispensable et sur les reflex une performance réservée aux boitiers très haut de gamme. L’autofocus performant est disponible sur tout le champ. Au niveau vidéo, voici les fonctions qui m’on paru essentielles au moment d’acheter le Z6 : -les 3 modes Ultra HD (limité à 30P) -les 7 modes HD dont un à 120P, -les 4 modes ralentis X4 et X5, -la stabilisation 5 axes, le mode vidéo accélérée. -les prises casque et micro. -le peaking en mode manuel qui permet une mise au point manuelle très sûre. Je n’ai pas dans l’immédiat l’intention de recourir à des profils d’image particuliers ni à un enregistreur externe.
MV : Pourquoi avoir acquis un Z6 et pas un Z7 ?H.B.: La cadence à 12 images secondes, la taille des fichiers suffisante pour mon usage, une meilleure qualité vidéo en raison d’un nombre inférieur de pixels (à vérifier), le prix. |
|
Cette image prise au 24-70/4 en monture S donne la mesure de la rapidité de l'autofocus et de la qualité de cette optique.
|
|
MV : Vous faites beaucoup de reportages sportifs. Le Z6 semble-t-il bien adapté pour le sport ?H.B.: Dans ce domaine trois critères principaux sont primordiaux à savoir la rapidité de l'autofocus, la cadence de prise de vue et la capacité à délivrer des images de qualité en basse lumière. Sur ces trois critères le Z6 est pleinement satisfaisant. Mais un boitier n'est rien sans les optiques qui l'accompagnent. J’attends donc la sortie des nouvelles optiques pour me faire une opinion définitive. En attendant les optiques F que j’ai testées fonctionnent très correctement avec l’adaptateur FTZ. |
|
RÉALISATION |
|
le Nikon Z6 est pratiquement aussi large que le D750 mais sensiblement moins haut. Le parti pris de Nikon a été d'allonger légèrement l'écran arrière d'une part et de faire migrer tous les boutons sur le côté droit du boitier. Il y a moins de possibilités d'accès direct aux réglages via boutons et molettes . En conséquence on doit plus souvent rentrer dans les menus pour modifier les différents paramètres. C'est moins pratique, on s'y perd un peu. En revanche l'écran est devenu tactile et un joystick a fait son apparition .
|
|
MV : Vous êtes un peu Nikoniste puisque vous possédez un D750. Est-ce qu'on sent qu'on est bien en présence d'un boîtier Nikon ? Est-ce qu'il existe des paramètres ou une ergonomie qui ne ressemblent pas à ce que fait Nikon ?H.B. : Oui, l’architecture des menus est semblable donc on prend ses marques rapidement. Le petit sélecteur qui permet de choisir le mode autofocus ou manuel a disparu de même que la molette de réglages de la cadence de prise de vue, ce qui oblige un recours plus fréquent aux menus. Les boutons sont plus petits et regroupés de manière différente. Toutefois l’écran tactile est un confort auquel on s'habitue très rapidement. En studio il faut bien penser à désactiver « appliquer réglages à visée écran » D8 « view off » qui permet de faire passer le viseur du mode rendu au mode ambiance pour éviter de se retrouver avec un viseur complètement noir quand on choisit les paramètres adaptés à la prise de vue au flash ( grosso modo100 iso 1/200 F8). |
|
MV : Nikon a sorti quelques produits photo ou « vidéo » ces deux dernières années qui laissent un peu sceptiques comme les actioncams de la gamme KeyMission, la gamme Nikon 1 ou le mystérieux Coolpix P1000 au zoom surdimensionné. Comme il s'agit de nouveau d'une innovation, Nikon a-t-il cette fois réussi son coup ?H.B. : Oui le pari est tout à fait réussi. L'hybride peut sembler être au premier abord un produit plutôt destiné aux utilisateurs ayant des besoins photo et vidéo, mais au final il est plus performant qu’un reflex en vidéo bien sûr mais aussi en photo. Toutefois la visée reflex demeure plus confortable spécialement aux cadences élevées de prise de vue ou la visée de l’hybride saccade rendant son utilisation problématique. Chez Nikon il n'y a pas de division vidéo professionnelle à protéger, du coup on retrouve sur ces 2 modèles pratiquement toutes les perfectionnements du moment en vidéo. MV : Que pensez-vous de la monture Z et des optiques associées 24-70mm f/4 S, 35mm f/1,8 S et 50mm f/1,8 S ? Envisagez-vous de fixer des objectifs NIKKOR F grâce à l'adaptateur de monture FTZ ? Que pensez-vous du prix du boîtier et des optiques ?H.B. : Personnellement j’aurais préféré un 24-120/4 beaucoup plus polyvalent à mes yeux. Ceci dit je trouve le 24-70 plutôt réussi. A la fois rapide et performant dès la pleine ouverture. Le 35 et le 50mm me paraissent un peu cher et a priori plutôt conçus pour les vidéastes en quête d’optiques à grande ouverture. Je trouve le tarif du 24-70/4 plutôt raisonnable en kit mais en revanche un peu cher quand il est acheté séparément. Je n’ai pas d’avis sur les deux autres optiques que je n’envisage pas d’acquérir . Au regard de tout ce qu’il offre, je trouve le prix du Z6 très raisonnable. Comparé à un D750 qui reste un excellent appareil photo, il en offre beaucoup plus bien évidemment en vidéo mais aussi en photo. Toutefois je remarque qu’il ne sera pas possible d’adapter une poignée supplémentaire qui aurait augmenté l’autonomie et permis un déclencheur vertical. MV : Le Z6 n'est pas un camescope, son enregistrement est limité à 29 minutes 59 secondes contrairement au GH4. Ca ne vous gêne pas, vous le photographe-vidéaste ?H.B. : Non je ne fais pas de captation de spectacle ou d’évènements qui nécessiteraient que je tourne plus de 30 minutes d’affilée. |
|
La possibilité de se servir de l'écran arrière pour faire sa visée tout en gardant un autofocus performant contrairement au "live vue" des reflex Nikon totalement indigent, permet d'adopter des points de vue différents comme cette image prise au ras du sol.
|
|
MV : Quid de la qualité de l'image ? Qu'avez-vous pu tester ?H.B. : La qualité d’image est excellente tant en photo qu’en vidéo y compris en haut iso. J’ai utilisé ce boitier en conditions réelles depuis trois semaines (4000 clics déjà !) dans des conditions très variées : action, reportage, studio. J’ai apprécié sa cadence de prise de vue jusqu’ici réservée aux boitiers haut de gamme .La rapidité de son autofocus utilisable sur tout le champ. La possibilité de vérifier et de corriger son exposition et les autres paramètres sans quitter l’oeil du viseur. C’est un atout déterminant en reportage. Le peaking qui permet un contrôle très efficace de la mise au point en reprise manuelle du point notamment. Je n’ai pas aimé le buffer qui se remplit trop vite. l’inconfort de la visée en mode rafale rapide qui offre une vision saccadée très inconfortable. Le manque relatif d’autonomie. |
|
MV : Le Z6 est plus sensible que le Z7 (100 à 51 200 ISO pour le Z6). Et plus rapide en Rafale (12 images par seconde avec le Z6) .Ce sont des facteurs qui vous semblent prépondérants ?H.B. : Encore plus que la montée en iso qui me semble déjà très satisfaisante sur le Z7, c’est la rafale à 12 images qui est est pour moi un atout essentiel sur le Z6. On pourrait toutefois ajouter que le Z7 permet une sortie directe des Time lapse en 4K, alors qu’avec le Z6 il faut se contenter d’une sortie en 1080p. La montée en iso est particulièrement bien maîtrisée sur ce boitier. Sur ce point, Nikon se montre bien plus performant que sur le Panasonic G9 que j’ai possédé. MV : Filmez-vous habituellement en 4K (UHD) ou FHD ?H.B. : Je filme encore beaucoup en HD mais je filme certaines séquences en UHD quand j'anticipe un besoin de recadrage. MV : Le Z6 dispose d'un Enregistrement vidéo FullHD ralenti : 1920 × 1080 en 30p ×4 / 25p ×4 / 24p ×5. Il dispose ausi d'un mode Time-lapse. Comptez-vous utiliser tous ces modes ?H.B. : J’ai déjà testé le mode Ralenti, j’apprécie énormément de pouvoir filmer des séquences au ralenti. Je l’ai trouvé qualitatif et apprécié la possibilité de conserver l’autofocus. Dommage qu’il ne soit qu’en full HD. L’AF demeure actif quand ce mode est sélectionné. J’ai utilisé le mode ralenti X5 notamment sur le groupe de percussionniste à Nanterre, je l’ai trouvé vraiment qualitatif. Concernant l'accéléré, on a donc le choix sur ce modèle entre un mode time Lapse ( grâce à l’intervallomètre intégré) qui demandera d’importer après coup ses images sur la time-line, ou un mode vidéo accéléré qui offre à l’issue de la prise de vue une séquence vidéo « prête à l’emploi ». C’est vraiment hyper pratique pour effectuer des tests préliminaires et obtenir un résultat rapide et exempt de flickering. Par contre, la nécessité de passer en mode « photo » pour activer l’un de ces deux modes ne me paraît pas logique. MV : Votre avis sur l'ergonomie ?H.B. : L'ergonomie est plutôt satisfaisante. Le boitier étant compact, tous les boutons on été déportés du côté droit du dos du boitier. Le dégagement oculaire est bon. Il n’y pas assez d‘accès direct à certaines fonctions importantes. |
|
© photo : Nikon | |
MV : Votre avis sur l'Autofocus ?H.B. : Je le trouve plutôt performant en vidéo dans des situations simples. Il est possible dans les menus de paramétrer sa vitesse et sa réactivité. Par exemple si un obstacle vient occulter momentanément son sujet. Après quelques essais j’ai préféré le mode « AF automatique », ce denier couvre tout le champ de visée (les trois autres modes étant « sélectif » « wide S » ou « wide L »). Dans ce mode il est possible soit de laisser l’appareil déterminer le sujet principal, soit de le déterminer soi-même en positionnant un cadre sur le sujet. Une fois la cible « verrouillée », l’ AF suivra de façon dynamique le sujet sur tout le champ. Dans la séquence sur le groupe de percussionniste, l'AF ne parvient pas toujours à faire le point, il est mis en difficulté particulièrement dans des conditions où la luminosité est basse et le sujet peu contrasté. Toutefois je n’ai pas connu d’effets de pompage comme précédemment sur des modèles de la marque. Le Z6 ne parvient toutefois pas à gérer des situations complexes comme la captation de sports collectifs ou le suivi du sujet principal est perturbé par le fait qu’il soit masqué régulièrement. Comme les exemples où je tente de suivre une basketteuse pendant un match. Le Peaking dispose de quatre couleurs de mise en relief sur trois niveaux (d 10* menu réglage perso). Une option que je juge indispensable notamment pour réaliser des interviews. A noter qu’un mode Loupe est également disponible. La combinaison de l’autofocus et de la retouche manuelle en tournant la bague de mise au point qui active automatiquement le peaking, permet une mise au point très sûre. |
|
MV : Votre avis sur la stabilisation ? Le confort écran / viseur ?Je l’ai trouvé performante et totalement indispensable pour des captations à main levée. Assez bizarrement l’autofocus tressaute par moment et vient donc perturber la captation. Quant au confort écran / viseur, il est inférieur à celui d’un reflex, surtout qu’on utilise une cadence élevée de prise de vue. En studio il faut passer en mode D8 sous peine de se retrouver avec un écran noir. MV : Pensez-vous que vous vous servirez de l'enregistrement double, qui permet apparemment de prendre des vues fixes tout en filmant en 4K ou Full HD ?H.B. : Oui à priori en dépannage. MV : Quid des possibilités / qualité du son ? Comment effectuez-vous habituellement la prise de son ?H.B. : J’utilise soit un micro HF ou Rhode cardioide. J’ai fait une petite captation chez moi dans un environnement relativement silencieux avec un VideoMic Pro de Rode. Le résultat m’a « semblé » exploitable. Néanmoins j’ai remonté le niveau de l’enregistrement à 18 sur une échelle de 1 à 20 car il me semblait par défaut un peu faible. Au passage j’ai pu constater pour préparer une petite captation en solo l’impossibilité de faire pivoter complètement l’écran, ce qui n’est pas du tout pratique. Il reste la possibilité de connecter Snap Bridge ou un autre écran mais cela rajoute toujours une contrainte supplémentaire. MV : Les menus du Z6 sont-ils compliqués ? Les menus Nikon sont connus pour cela :)H.B. : J’ai trouvé les menus plus compliqués et plus denses avec l’accroissement du nombre de fonctions. Je m’y perds parfois. Il est certain que même pour un nikoniste, un temps d’adaptation est nécessaire. Le boitier a un gros potentiel avec nombre de fonctions inédites. L’écran tactile et le joystick (déjà présent sur certains modèles) est un atout intéressant. MV : D'autres remarques ou fonctions ?H.B. : Oui, le Snap Bridge. Cette application à installer sur son téléphone (pour ma part, un Android) ou sur sa tablette (iPad) permet de déclencher puis de stopper l’enregistrement à partir d’un écran déporté, téléphone ou tablette, et de faire la mise au point à distance, c'est surtout pratique pour contrôler la Map. En revanche il est impossible de modifier les paramètres de prise de vue ou la balance des blancs à distance. Il faut couper l’application, modifier ses paramètres sur le boitier, puis relancer l’appli, ce qui oblige à faire des allers-retours jusqu'au boîtier pour modifier les réglages. Une limitation difficile à comprendre d’autant qu’en mode photo il est possible tout en restant en automatique de modifier la balance ou de corriger l’exposition. Signalons aussi que Nikon propose un Cloud en illimité mais pour des fichiers ne faisant pas plus de 2 Mo chacun. Au niveau pratique, un sélecteur au dos du boitier permet de choisir entre mode vidéo et mode photo. Ce sélecteur est agrémenté d’un bouton poussoir « display » qui permet d’afficher à la demande différentes infos comme l’histogramme etc… Un bouton info au dos du boitier permet d’accéder à un menu personnalisable. Une fois ce menu activé, l’écran tactile permet de modifier très facilement les principaux paramètres de prise et de sélectionner au besoin la zone de mise au point. |
|
Cette image 24-70/4 monture S à pleine ouverture permet de se faire une idée de la netteté de l'image au centre et surtout dans les angles. On voit que l'optique est pleinement utilisable dès f4.
Visitez aussi le site d'Hervé Bellenger : imagestadium.com |
|
FICHIERS VIDÉO NATIFS |
|