Test DJI Osmo
le contorsionniste
22 juin 2016 par Thierry Philippon
L'Osmo s'apparente à une mini-steadicam, c'est à dire une caméra assistée par un système de stabilisation sur nacelle, l'ensemble étant tenu au moyen d'une poignée d'environ 15 centimètres de long. Ce produit plutôt haut de gamme est conçu par DJI, un fabricant chinois bien connu pour ses drones Inspire et Phantom, ainsi que son système de stabilisation autonome pour DSLR, le Ronin-M, proposé aux alentours de 1500 euros. Toutefois DJI n'est pas le premier à s'aventurer sur ce créneau. On peut notamment citer en précurseur le Movi de Freefly Systems, produit professionnel très haut de gamme à 15.000 euros. Mais revenons à l'Osmo... Le centre névralgique du système est la nacelle au sommet de laquelle trône la caméra, elle-même logée dans une boule. La nacelle anticipe les mouvements naturels du bras (transmis à la poignée) grâce à un dispositif électro-mécanique à 3 axes qui adoucit les transitions. Ce système de stabilisation repose sur des moteurs Brushless, capables de distinguer les mouvements de l'opérateur ou de les accompagner. On peut même contrôler la boule avec précision à l'aide du Joystick quadridirectionnel. Mais on ne peut éviter dans ce cas un mouvement un peu brusque si on change d'axe. La caméra présente un angle d'inclinaison de 170 degrés et peut pivoter horizontalement sur 640 degrés. La caméra est capable de prendre des photos d'une résolution de 12 mégapixels et surtout, d'enregistrer des vidéos en 720p, FullHD 30 ou 60p, 2,7 K, UltraHD ou même vrai 4K. |
La tête de la caméra est la Zenmuse X3 qu’on retrouve sur le Phantom 3 et le drone Inspire One. La X3 de l’Inspire peut s'utiliser sur l’Osmo mais pas l’inverse, en raison d'une légère différence de conception. Le capteur choisi par DJI est le Sony Exmor R BSI 1/2,3" qui exploite 12,4 millions de pixels. Dans son test du Phantom 3, Antoine Désir rappelait que ce capteur est celui qu’on retrouve chez Sony sur l'actioncam FDR-X1000 et chez GoPro, ou encore sur des caméscopes plus conventionnels chez JVC.... C’est un capteur classique mais peu sensible, un peu moins efficace en 4K, mais plutôt bon en FullHD. L'optique ne dispose pas de zoom mais pour l'usage de l'Osmo, un zoom a moins de sens que sur un camescope. La tête de l'Osmo peut être remplacée - moyennant adaptateur - par la Zenmuse X5, une tête prévue pour le drone Inspire, qui intègre une caméra micro 4/3 (type GH4 en 17.3 x 13.0 mm au lieu de 6.17 x 4.55mm). On peut donc adapter des objectifs comme ceux proposé par DJI, les optiques 12 et 17 mm. Par ailleurs, la Zenmuse X5 se trouve dotée d'un capteur plus performant de 16 Mp au lieu de 12.4 Mp. On recense aussi la Zenmuse X5R, dotée du mode Raw (D-Log), du mode HDR et du logiciel DJI CineLight pour Mac. Attention les prix s’envolent comme des drones ! Comptez un peu plus de 2000 euros pour la tête Zenmuse X5 et un peu plus de 2600 euros pour le X5R. Si vous souhaitez comparer les 3 produits, c'est ici. Le prix de l'Osmo de base reste raisonnable puisqu'il ne dépasse pas les 650 euros TTC. Un tarif toutefois supérieur à la plus chère des GoPro, la Hero 4 Black. Alors de quoi est capable cet Osmo ? Pour le savoir, passons au test proprement dit ! |
Le test du DJI Osmo
L'Osmo est contenu dans un étui en nylon qui ressemble à un gros revolver ou de façon plus poétique, à un mini-violon ! La finition de l'Osmo, mélange de plastique et d'aluminium, reste très aboutie. Le produit est annoncé comme léger, mais il pèse tout de même 201 grammes avec batterie. Ajoutez le poids d'un smartphone (un iPhone 6 par exemple pèse 130 grammes), et vous dépassez les 330 grammes. Le poids est supportable mais loin d'être ridicule pour un appareil tenu avec le bras déplié horizontalement, durant plusieurs minutes d'affilée. La première prise en mains de l'Osmo surprend étant donné le caractère novateur du produit mais le maniement reste intuitif, sans (trop) consulter la notice en français. Pour magazinevideo, j'ai juste testé un produit de ce type, le Rollei EGimbal G4 +, à la seule différence que ce dernier se destinait à des caméras type GoPro. Et je n'ai jamais tourné en tournage réel. |
Une fois la batterie de l'Osmo chargée, et la carte mémoire micro-SD insérée (compatible micro-SDHC, micro-SDXC), l'engin est immédiatement opérationnel puisque rien ne l'empêche de fonctionner sans écran, excepté qu'on cadre dans ce cas à l'aveugle. Bien sûr, c'est un pis-aller, l'appareil n'est pas pleinement autonome dans ce cas... |
La visualisation avec écran est la façon "normale" de fonctionner, l'ergonomie de l'Osmo est d'ailleurs prévue à cet usage. Pour cela, il faut fixer un smartphone sur l'Osmo ou connecter une tablette tactile. La liaison s'effectue par Wi-Fi après téléchargement de l'application gratuite DJI Go qui s'avère en elle-même excellente. Le bras qui supporte le smartphone se visse sur une fixation nommée "rosette" qui prend en charge divers accessoires externes (support voiture, trépieds vidéo spécialisés, etc.) proposés au catalogue du fabricant.
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La compatibilité Wi-Fi a été testée avec succès avec un smartphone Samsung (Android) et un iPad (iOS). Le premier peut se fixer sur l'Osmo, la tablette, évidemment non, même si on choisit une "mini-tablette". En revanche, tous les smartphones ou presque sont acceptés car le système est pourvu d'un rail coulissant qui s'étire grâce à un solide système de ressorts, pour permettre l'encastrement du smartphone, selon ses dimensions. C'est très bien conçu, ouvrant la porte à la quasi-totalité des smartphones du marché. Même un smartphone comme l'iPhone 6 Plus, de taille plus imposante, s'adapte (confirmé par DJI). |
Il faut assimiler durant un moment la logique du Joystick quadirectionnel (j'ai commis quelques erreurs pour le sens haut-bas), et le mode de fonctionnement de la gâchette située au dos. Si vous appuyez deux fois, l'Osmo cherche sa position horizontale par défaut, droit devant, alors que si vous cliquez 3 fois, il passe en mode "Selfie" pour vous filmer. Selon sa position de départ, l'Osmo "cherche" dans quel sens il doit tourner pour se retrouver dans la bonne position. Il se trompe rarement (en fait, jamais). Notez que le temps de réaction est réglable depuis l'application DJI Go, selon 3 vitesses : lent, medium ou rapide. Si vous trouvez notamment que le Joystick est trop brutal, auscultez les paramétrages du Joystick. |
L'équilibrage s'obtient en peu de temps sans réglages particuliers, si ce n'est le déblocage des différentes parties de l'Osmo (si elles sont bloquées au déballage ou lors d'un transport). C'est une des différences majeures avec la plupart des autres systèmes de stabilisation existants que j'ai pu connaître. Il existe sur le marché des systèmes plus professionnels que l'Osmo mais qui nécessitent des ajustements et équilibrages laborieux, et qui ont tôt fait de décourager. Je me souviens avoir bien peiné avec le ModoSteady de Manfrotto, ou avec d'autres systèmes plus anciens comme le Steadicam junior, au concept toutefois bien différent. Ce temps gagné à ne pas devoir équilibrer l'engin est une des forces-clés du système Osmo : temps gagné, pas d'énervement, et la certitude d'obtenir une image un minimum exploitable. Toutefois, une réinitialisation de la nacelle peut s'imposer, elle s'effectue depuis l'application DJI Go qui dialogue avec l'Osmo.
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Filmer avec l'Osmo est gratifiant. Un débutant obtient des images rapidement bluffantes en marchant, ou en descendant un escalier, voire en courant. J'ai poursuivi un chat, déambulé dans une maison, descendu plusieurs terrains caillouteux de montagne, et même suivi en courant des enfants, avec une remarquable réaction de l'Osmo à chaque fois, hormis un cadre parfois trop orienté vers le ciel (je n'avais plus d'écran, faut d'avoir suffisamment rechargé le smartphone !). La stabilisation en elle-même est exemplaire, mais la caméra requiert quelques heures de pratique avant d’en profiter pleinement. Même si le rendu est fluide et stable, un entraînement minimum, voire un réglage fin de l'Osmo s'avère nécessaire. Avec un Osmo standard, on peut aussi se faufiler entre deux troncs d'arbre alors qu'un système classique sera trop encombrant et ne pourra pas franchir ce type d'obstacle. Mais du coup, on peut considérer l'Osmo comme casse-cou, et donc potentiellement fragile. J'ai été tenté de l'utiliser sur des chemins de randonnée, mais j'ai pris des risques, tenant d'une main l'Osmo et me retenant de l'autre main au cas où ! Même chose en courant : on n'est jamais à l'abri d'un chute lorsqu'on regarde simultanément ses pieds et un écran ! L'Osmo semble plus recommandé pour tourner des scènes composées de plusieurs personnes, des groupes, comme un mariage, une réunion professionnelle, ou associative ou sportive, un ensemble d'acteurs, ou un making of de film. Je crois un peu moins à une utulisation intensive de l'Osmo en voyage (comme on en voit avec les GoPro), mais cela reste possible, voire spectaculaire : des prises de vues réalisés en Osmo ddepuis un train, une voiture ou un tuk-tuk en Asie, promettent un rendu détonant ! Inconvénient, l'Osmo est plus long à mettre en route qu'une actioncam, à partir de son étui de rangement. Surtout si on doit attendre la connexion Wi-Fi avc le smartphone. Comptez 40 à 60 bonnes secondes avant d'être pleinement opérationnel. En revanche, on "dégaine" assez rapidement si on tient l'Osmo à la main en état de veille, smartphone déjà allumé : comptez 10 secondes environ. Par contre, on applaudit à tout rompre la géométrie de l'image qui est très soignée, n'accusant jamais l'effet de tonneau caractéristique des très grands-angles. La lentille à neuf couches rectiligne de 20mm (94 degrés) n'accuse ni flou sur les bords ni distorsions trop marquées. Par rapport au rendu d'une actioncam GoPro ou d'une Sony, la géométrie m'a paru supérieure, sans toutefois avoir pu réaliser une comparaison immédiate. En contrepartie, une seule position grand-angle est disponible, contre 2 ou 3 chez Sony ou GoPro. Notez l'existence d'un filtre UV physique (qui se visse sur l'objectif) qui s’avère utile non seulement pour filtre les ondes UV mais aussi et surtout, pour protéger l’objectif de l'Osmo, élément particulièrement exposé à d’éventuels choc ou rayures, n’ayant aucune protection possible de type pare-soleil. Enfin, signalons que l'ouverture est de f/2.8. |
Face à des personnes, la réaction est prévisible : l'engin étonne et attise la curiosité, ce qui fait que vous passez difficilement inaperçu. Du coup, surtout en ces temps où le moindre objet insolite devient suspect, l'Osmo sa fait copieusement remarquer, et je me verrais mal désormais déambuler dans un édifice religieux avec un Osmo. J'espère me tromper mais je crains que ce genre de Gimbal mette mal à l'aise l'opérateur qui filme dans des lieux publics, et qu'il attire les regards vers lui. Il en sera de même pour les produits proches de l'Osmo : je pense au EGimbal G4 + de Rollei que j'ai déjà testé ou au Feiyu G3, conçu pour caméras GoPro et clones de GoPro. En courant, les plus fortes secousses sont compensées par l'Osmo par une correction mécanique qui peut déplaire, avec une sensation de rebond désagréable, si ledit rebond est trop marqué. Ce phénomène se produit si vous abusez vraiment et prenez votre Osmo pour un drone, ce qu'il n'est tout de même pas ! C'est un engin terrestre, qui accompagne les secousses de votre corps en les compensant au maximum. |
En FullHD ou 2,7K, deux modes parmi beaucoup d'autres que propose l'Osmo, la qualité d’image de la caméra de DJI est quasiment à la hauteur des meilleures actioncam Sony ou GoPro hauts de gamme. Toutefois ce compliment ne vaut pas pour le 4K qui reste paradoxalement en retrait de la qualité du FullHD. Certes, l'image est très piquée en 4K, mais la compression s'en sort mal face à des sujets complexes comme une foret comportant des feuillages ou même des zones unies telles que des champs de vignes. Le 4K reste paradoxalement bien adapté à des plans fixes, une attitude malgré tout contre-nature pour un engin aussi mobile. A défaut, le FullHD ou le 2,7K vous tendent les bras, ils donnent d'excellents résultats. Notez qu'on peut choisir entre l'Ultra HD et le 4K (dit "vrai" 4K). |
La connexion avec l’application DJI Go fonctionne bien et s’avère très souple. Elle permet d'accéder à une grande variété de paramétrages images et de réglages de prise de vue (Time-lapse, panorama automatique, long temps d'exposition et ralenti). C'est d'ailleurs la seule manière d'accéder aux réglages, l'Osmo physique ne disposant d'aucun bouton de réglage. Mais si vous extrayez la carte mémoire (par exemple), il faut complètement réinitialiser la connexion sous peine de voir s’afficher « carte non présente ». Réinitialiser signifie éteindre le smartphone (ou la tablette) et l’Osmo et dans notre cas, régénérer une nouvelle liaison, sans quoi l’application se fige sur le dernier état des lieux connu. Notez que les images peuvent être stockées directement sur le smartphone, ce qui permet de dépanner un utilisateur qui verrait sa carte mémoire parvenir en bout de course. |
Pas de réglage Protune chez DJI. En revanche, on retrouve une grande variété de Profils D'images comme le D-Cinelike, D-Log, Portrait, N&B, etc. |
Côté photos - car l'Osmo est aussi un preneur de vues fixes - on bénéficie d'un choix possible entre du jpg, du Raw (extension DNG), ou du Jpeg+Raw. Une variété d'options appréciée car indisponible sur les actioncams qui se contentent du Jpeg. Voici pour conclure ci-dessus 2 photos en Jpeg prises avec le DJI Osmo. |