La nécessité de trier ses séquences s'est accrue avec l'informatisation des fichiers vidéo. Ce dossier pratique vous présente différentes façons de trier, depuis la prise de vues jusqu'au montage, et même après !
Mon premier conseil : avant même de presser le bouton Record, dites-vous que vous êtes en train de trier ! En effet, plus vous multipliez les scènes sans préparation, filmées dans la précipitation, plus vous compliquez le tri ultérieur de vos images. Les énormes capacités des camescopes à disque dur ou des mémoires embarquées en termes d'autonomie, ne doivent pas vous griser. Sachez raison garder !
Le tri devrait être ensuite une préoccupation constante tout au long des étapes de prises de vues, de capture et de montage. Ceux qui ne trient pas en payent le prix à un moment donné, en termes quantitatifs (temps passé a posteriori), ou qualitatifs (une multiplicité de séquences non triées conduit à négliger de bonnes séquences). Toutefois, il est vrai que la nécessité du tri n'est pas identique d'un utilisateur à l'autre. Ainsi, l'urgence d'un tri se fait moins sentir si votre activité filmique se cantonne à trois tournages par an pour 30 minutes d'enregistrement ! Deux profils d'utilisateurs sont réellement concernés par un grand ménage des rushes. D'une part, les vidéastes qui filment beaucoup. D'autre part, ceux qui acquièrent un camescope muni d'un disque dur volumineux (de 60 Go à 240 Go) et de manière plus générale, ceux qui doivent impérativement stocker leurs images sur le disque dur de l'ordinateur. Faute de quoi ils prennent le risque d'engorger la mémoire de leur PC.
Trier sur le lieu même où vous filmez (par exemple en vacances) se justifie lorsque vous êtes éloigné de tout lieu de montage pour plusieurs jours ou semaines, et que vous souhaitez supprimer des séquences pour gagner de la place (sur une carte mémoire, mémoire intégrée ou un disque dur).
Avec un camescope à bande en revanche, la suppression d'une séquence est quasiment exclue. C'est l'inconvénient de la logique vidéo sur la logique informatique des fichiers. Pour autant, il ne faut pas se résigner à ne rien entreprendre. Si vous aveaz filmé des scènes de voyage mais aussi des scènes de famille, une forme de tri est de répartir vos rushes sur deux cassettes. L'idée est de réserver une cassette (ou plusieurs d'ailleurs) aux scènes strictement familiales tandis que le reste du stock est dévolu aux scènes de voyage. Vous prendrez soin d'étiquetter dès le départ la ou les cassettes "famille" pour la distinguer au cours du tournage.
Lors de cette étape, le tri consiste simplement à s'épargner de capturer les séquences inutilisables car il est inepte de capturer l'intégralité des prises de vues ! Cette démarche se justifie pleinement parce que le poids des fichiers - particulièrement en HD - encombre inutilement le disque dur de votre ordinateur. D'autre part, vous perdez du temps par la suite à supprimer les vues inexploitables, autant le faire en amont. Seul revers de la médaille, un plan éliminé par erreur risquera d'être définitivement "oublié".
Examinons maintenant s'il existe des différences de méthodes selon le support d'enregistrement :
a) Avec un support à bande
Les possibilités de tris à la capture avec un camescope à bande sont à la fois plus souples et moins confortables qu'avec un support de type carte mémoire. Plus souples dans la mesure où on peut capturer "à la volée" tout ou partie d'une séquence, sans logique de fichier. Mais le support à cassette est aussi moins confortable dans la mesure où vous ne pouvez pas - au moment de la capture - visualiser l'ensemble de vos rushes, à la façon d'un catalogueur photo. Pour aller chercher la scène de Belle-Maman qui se trouve à 32 minutes et 54 secondes, et vérifiez-r qu'elle est vraiment mieux que celle à 5 minutes et 10 secondes, vous devez bobiner les 30 premières minutes qui précèdent la scène en question. Impossible d'y accéder directement !
C'est pourquoi bon nombre de vidéastes trient peu à ce stade et capturent tout ou presque. Ils se consolent en envisageant un ménage ultérieur après capture. D'autres adoptent la tactique de capturer les images à la volée en stoppant la capture à chaque fois que les images "dérapent". Inconvénient du dispositif, c'est un travail un peu laborieux.
b) Avec un support de type carte mémoire ou disque dur ("non linéaire").
Indirectement, une "aide au tri" est proposée même si elle ne se nomme pas ainsi. En effet, lors de la capture depuis un support non-linéaire, on peut facilement sélectionner les fichiers destinés à être importés sur le PC (ou le Mac) puisque la sélection se présente toujours sous la forme d'une case à cocher sur ou sous l'imagette du clip. En effet, ici il n'y a pas de fenêtre de capture mais un affichage de l'ensemble des fichiers du camescope à importer. On retrouve pareil dispositif aussi bien sur les logiciels offerts en bundle avec les camescopes (Picture Motion Browser chez Sony, HD Writer chez Panasonic) que sur les logiciels tiers (Pinnacle Studio 12 , VidéoStudio, iMovie 08/09). Pour savoir si le clip est à importer ou pas, il est bien entendu possible d'en lire les première secondes dans la fenêtre de capture, ou la totalité pour être certain qu'il n'est pas à retenir. Selon le logiciel, la lecture est plus ou moins souple, parfois le clip ne s'affiche que dans une fenêtre de taille limitée. Si le clip est insignifiant ou résulte d'un déclenchement accidentel, ignorez-le en décochant la case. Si vous avez un nombre limité de plans ratés, on vous conseille de cliquer sur "tout sélectionner" puis de décocher les clips non retenus.
Seul inconvénient de ce tri sélectif, l'incapacité de capturer une section délimitée d'une séquence. En effet, chaque séquence est constituée d'un fichier indivisible. Même si cinq secondes seulement vous intéressent sur un fichier de cinq minutes, vous devez importer les cinq minutes de rushes !
Classer ses séquences au niveau du chutier, avant tout montage, est plus qu'utile. Le mode de tri le plus classique - généralement boudé par les pros mais parfois utile - consiste à classer ses plans en fonction de leur qualité. Selon le logiciel, on peut souligner les bons plans d'une certaine couleur, leur affecter des commentaires (Mauvaise prise, Bonne prise, Meilleure prise…) ou leur attribuer des notations sous forme d'étoiles par exemple. On rejoint ainsi la philosophie des fiches de dérushage. Mais on peut aussi considérer que ce type de classement est une grosse perte de temps, d'autant que la suite du montage peut venir nuancer les premières annotations. Ainsi un plan qualifié de "très bon" raccordera peut-être moins bien qu'un plan assez proche annoté "moyen" mais qui offre un meilleur enchaînement ! Bref, les qualifications de plans ne sont pas forcément à suivre au pied de la lettre.
Une stratégie de tri complémentaire consiste à classer ses séquences dans le chutier en autant de dossiers distincts que votre film comporte de "sections" (ou de thèmes si vous préférez). Ainsi le vidéaste ordonné pourra créer "x" dossiers distincts pour un voyage itinérant ayant comporté "x" étapes différentes. On peut parfaire le dispositif si le montage suit une chronologie précise en faisant précéder chacun des noms de dossiers par les chiffres 00, 01, 02, etc. en fonction de l'ordre dans lequel ces étapes apparaissent dans le montage. En effet, une présentation du chutier quelque peu "normée" avec une logique de lecture occidentale - la première étape chronologique en haut, la dernière en bas - permet de trouver ses plans plus rapidement.
Avec l'informatisation généralisée des fichiers, les plans sont devenus des numéros qui se suivent, souvent précédés d'un même identifiant (ex SANY0032, SANY0033, SANY0034...). Impossible de repérer un plan d'un autre par son nom dans une liste devenue anonyme. C'est pourquoi tous les logiciels de montage proposent aussi un affichage par "icone", offrant une visualisation de chaque plan sous la forme d'une "imagette".
Certains utilisateurs parviennent à se repérer ainsi, sans chercher plus loin. Problème de l'imagette : elle n'est pas forcément représentative de la séquence puisqu'elle ne montre que la première image du fichier (certains logiciels proposent de modifier l'imagette mais ils sont rares). En outre, s'il existe plusieurs plans quasiment identiques du même sujet, les imagettes seront elles-mêmes identiques ou presque. C'est pourquoi nous pensons qu'il est utile - en solution complémentaire - de nommer les plans plutôt que de se baser sur les seules imagettes. Mais nouvel inconvénient : identifier toutes les séquences d'un chutier par un nom discriminant est bien trop fastidieux, leur nombre pouvant atteindre plusieurs centaines.
Une astuce possible est de renommer ses fichiers "par groupes thématiques". C'est-à-dire que si nous avons filmé des chauve-souris géantes sous tous les angles et que nous obtenons 20 plans différents (tous intéressants), nous renommons ces 20 plans "chauve_01", "chauve_02", "chauve—03", etc. Si par la suite, nous dénombrons 10 plans se rapportant à un monument visité, nous renommerons nos plans "monument_01", "monument_02", "monument_03", etc. Renommer un groupe de plans est assez rapide grâce à l'exécution d'un script semi-automatique. Parmi les systèmes de renommage existants, on peut citer sous Windows, Lupas rename et The Rename, ou sur Mac, le script de renommage de fichiers disponible avec Automator, relativement simple et surtout, efficace.
Le tri peut se poursuivre une dernière fois lorsque le montage est achevé. Trier revient ici à distinguer simplement les fichiers à conserver de ceux dont on peut se débarrasser. Il est assez délicat de donner des recommandations en la matière car la stratégie de chacun dépend étroitement de facteurs "techniques" parmi lesquels la capacité de stockage disponible, le poids des rushes capturés, la possibilité ou non de sauvegarder ses montages sur bande, et la fréquence des montages. En effet, le comportement va différer du tout au tout pour l'utilisateur qui ne pratique qu'un seul montage en SD par an sur cassette, et qui ne capture que 5 Gigas de rushes et le vidéaste qui génère plusieurs projets par an de 50 à 100 Go de données chacun à partir d'un camescope HDD. Un chiffre assez rapidement atteint en HD pour de gros projets...
La difficulté de prodiguer des conseils provient aussi de la variété de comportement des utilisateurs. Certains ne gardent absolument aucun rush ni montage, considérant qu'une simple gravure du montage sur DVD (ou Blu-ray) suffit pour la postérité. Et inch Allah ! D'autres conservent absolument tout (rushes, fichiers capturés, montage, fichier autonome du montage, fichiers de rendus) en double exemplaire ! D'autres encore vont préférer opérer un "tri sélectif" en ne retenant que les fichiers capturés correspondant aux séquences montées. Certains utilisateurs qui tournent en DV/HDV, enfin, vont juste stocker le fichier de Projet pour pouvoir recapturer en cas de besoin. Et ils se débarrasseront de tous les autres fichiers. On trouve aussi toutes les variantes imaginables entre tous ces profils... !
Dès la capture, on peut aussi trier ses séquences à l'aide d'un outil logiciel tel qu'un catalogueur vidéo (entre 30 et 70 euros, hors freeware). La logique est proche de celle d'un catalogueur photo (tel que LightRoom d'Adobe) excepté que les catalogueurs vidéo sont nettement plus rares, même sous Windows. L'intérêt d'un catalogueur vidéo est de classer ses vidéos dans une base de données en affectant à chaque groupe de séquences, voire à chaque séquence, des mots-clés, ou une description. On peut ensuite retrouver une séquence isolée, avec une plus grande facilité. Il suffit par exemple de saisir le mot "vacances" pour afficher toutes les séquences se rapportant à ce thème.
Un catalogueur vidéo sait aussi capturer vos vidéos, peut les éditer sommairement et exporter vos données si besoin. Parmi les catalogueurs vidéo connus, sous Windows, on recense CassetteDV (version de 2006) de Paul Glagla. CassetteDV est, comme son nom l'indique, spécifiquement destiné aux rushes sur bande. C'est un freeware. Sur Mac, on trouve le plus connu, le logiciel iDive de la société montpelliéraine Aquafadas et FootTrack de T-Squared Software.
L'inconvénient des catalogueurs est que la logique sur laquelle ils reposent nécessite un esprit méthodologique cartésien, presque "monomaniaque". En effet la cohérence de l'ensemble repose sur une rigueur de nommage. Par exemple, si on commence à identifier ses séquences de "voyage" par le mot "voyage" puis qu'on s'avise de nommer les scènes de l'année suivante par le terme "étranger", on a toutes les chances de rater son catalogage ! Or sur de nombreuses années, il n'est pas toujours facile de conserver une parfaite constance. Personnalités lunatiques et désordonnées, s'abstenir !
(Comment bien trier ses séquences vidéo ?)
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