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Mieux comprendre les capteurs en vidéo

les capteurs, comment ça marche ?

 

11 janvier 2016 par Antoine Désir

 

Notre oeil est notre capteur visuel. Mais un caméscope ou une caméra ne bénéficient pas des millions d'années d'évolution naturelle qui ont perfectionné cet organe exceptionnel. En quelques dizaines d'années, des ingénieurs ont donc conçu et fabriqué des capteurs de lumière, capables de transformer des informations lumineuses en signaux électriques. Dans le système que constitue un appareil photo, une caméra ou un caméscope, le capteur se situe dans les premiers éléments sur le chemin de la lumière, après l’objectif et les filtres. S'il n'est qu'un élément de la chaîne entre le monde visuel et l'image numérique, c'est l'un des plus importants, si ce n'est le plus important dans cette chaîne.


Nous abordons dans ce dossier technique la plupart des questions que vous êtes en droit de vous poser sur les capteurs de vos caméras, camescopes ou appareils photo. Nous citons à chaque fois que c'est possible des références concrètes d'appareils se rapportant aux notions abordées.


Nous abordons successivement les différentes technologies des capteurs (CMOS, etc.), et les fameuses notions de photosites, de pixels et de résolution. Nous essaierons de comprendre aussi la corrélation entre la notion de taille du capteur et le nombre de photosites. Nous poursuivrons avec la consommation (effet induit de la taille), et la vitesse du capteur. Enfin, nous terminerons par la sensibilité, la profondeur de champ et les évolutions possibles des capteurs.


Suivez le guide...


BPMCC

> LIRE LA SUITE : Technologie : simple ou triple, CCD ou CMOS, le rétro-éclairé

Technologie : simple ou triple, CCD ou CMOS, le rétro-éclairé

Avant les capteurs vidéo, il y avait la pellicule. Tous les rayons lumineux agissaient sur la chimie de cette pellicule. C'était du "mono-capteur". Pour bien capter les couleurs, il faut les différencier et donc filtrer selon la longueur d'onde de celle-ci. Deux techniques s'opposent : trois capteurs précédés d'un prisme qui séparent les couleurs ou un seul capteur précédé d'un filtre coloré (dit de Bayer) qui ne laisse passer qu'une partie du rayon lumineux sur chaque photosite. La différence théorique est importante et s'est longtemps illustrée en pratique avec les supériorité des triCCD des caméscopes amateurs et professionnels. Les développements technologiques récents marginalisent rapidement cette solution haut de gamme qu'est le tri-capteur au profit de gros mono-capteurs. Il y a coïncidence, non fortuite, entre la marginalisation du tri-capteur, souvent CCD, et la montée en puissance du mono-capteur, souvent CMOS. Techniquement, nous savons que le monoCCD a existé et que le triCMOS continue à capter de très belles images (HC-X920, XF300, HXR-NX3, AG-PX270, GY-HM600, etc), les combinaisons sont donc possibles.


tricjoicoptics
schéma : © www.anfoworld.com

S'il reste de la place pour les systèmes à trois capteurs, il n'y en a plus beaucoup pour les capteurs CCD (Charge Coupled Device), emportés par la vague des capteurs CMOS (Complementary Metal Oxide Semiconductor). Ces derniers sont moins coûteux, a priori moins sensibles, mais plus faciles à développer selon les technologies électroniques des puces informatiques. La possibilité de créer des gros capteurs, d'affiner la partie électronique et d’accélérer la cadence de prise de vue sont des arguments forts, mais c'est le coût de fabrication qui a vraiment convaincu les fabricants de basculer vers le CMOS. Le CCD est devenue une technologie de niche, qui ne sera de nouveau développée que quand les capteurs CMOS auront atteint leurs limites.


Car les capteurs CMOS ont un gros défaut par rapport aux CCD : les pistes électroniques prennent de la place sur le capteur au détriment des photodiodes (sensibles à la lumière), ce qui pénalise fortement la sensibilité native du capteur. C'est ce que les spécialistes appellent le "Fill Factor" ou "facteur de remplissage". Sur des capteurs CMOS classiques, il varie de 30 à 80%, c'est à dire que 20 à 70 % de la surface du capteur est inutilisable pour la captation lumineuse. Gloups ! Les CCD s'approchent des 100% car la partie électronique est sur les bords ou en dessous des photodiodes.


CCD CMOS
schéma : © http://meroli.web.cern.ch/
Pour améliorer la sensibilité native, il fallait changer la conception des capteurs. Puisque l’électronique opaque encombre le chemin lumineux, éclairons le capteur par l'arrière. C'est l'idée du dernier développement des capteurs CMOS, le BSI (Back Side Illuminated) ou capteur rétro-éclairé. En réalité, on retourne le capteur pour mieux exposer les photodiodes au flux lumineux, même si cela ajoute des complexités importantes sur l'empilement des couches de la puce. Mais vue l'importance du marché des petits capteurs CMOS qui équipent des millions de téléphones évolués, cela vaut le coût de développement. Et c'est comme ça que les capteurs CMOS, avec l'aide des micro-lentilles qui concentrent la lumière sur les parties sensibles du capteur, refont leur retard sur les CCD en sensibilité.
typical pixel
schéma : © www.extremetech.com


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Photosites, pixels et résolution

Lorsqu'un fabricant annonce un caméscope Full HD avec trois capteurs de 2 millions de pixels, il n'y pas de souci d'interprétation. On peut compter sur deux millions de points rouges, deux millions de points verts et deux millions de points bleus. Ce qui donne deux millions de pixels RVB : le compte est bon (Full HD = 1920 x 1080 pixels = 2 073 600 pixels) ! Six millions de photosites pour deux millions de pixels RVB. OK ?


Lorsqu'un fabricant annonce un caméscope Full HD avec un seul capteur de 3 millions de pixels, ça passe ? Et non, le marketing a pris le pas sur la technique. Dans le caméscope, il y a un capteur avec 3 millions de photosites, chacun captant une seule couleur derrière son filtre de Bayer. Pour former un pixel complet derrière un filtre de Bayer, il faut un carré de 4 photosites (un pour le rouge, deux pour le vert, un pour le bleu). Donc l'image est formée à partir 750 000 pixels, pas les deux millions nécessaires à une vraie image Full HD. Une astuce (un même photosite est utilisé par plusieurs pixels consécutifs) et du calcul "gonflent" l'image en Full HD. Mais c'est de la gonflette, pas du vrai muscle ! Combien faut-il de photosites pour faire une vraie image Full HD sur un seul capteur et son filtre de Bayer ? 4 photosites par pixel, 2 millions de pixels, avons-nous dit ? Et nous voilà à 8 millions de photosites. Voilà pourquoi le célèbre capteur Sony de 1/2,3" qui collectionne 12 Mp peut fournir une belle image Full HD s'il est bien exploité. Vous savez, ce capteur que l'on retrouve avec des variantes chez Sony dans ses AS200, AXP33, AX1, chez JVC dans le HM200, chez GoPro dans le Hero4 et chez DJI dans le Phantom 3 Pro, etc. Ah oui, quand vous lisez "12 Mp" pour un capteur, n'oubliez pas : ça veut dire 12 millions de photosites, pas 12 millions de pixels, même si les départements commerciaux ne sont pas d'accord !


Bayer
Image : matrice de Bayer, 64 photosites, 16 pixels

Exercice : ce capteur de 12 Mp que l'on retrouve aussi bien chez GoPro que chez JVC ou Sony, peut-il donner une bonne image 4K (8,9 Mpixels) ou Ultra HD (8,3 Mpixels) ? Combien de photosites sur un seul capteur pour sortie une vraie image Ultra HD ? (33 millions) Vous voyez le problème ?


Cette embrouille sur les photosites a une influence directe sur la qualité d'image. Nous avons vu que des caméscopes Full HD embarquent des capteurs qui n'ont pas assez de photosites, parfois pour d'excellentes raisons (voir la suite). Si la définition de l'image en sortie est bien du Full HD (nous avons bien 1920 x 1080 pixels sur chaque image enregistrée), sa résolution est bien inférieure. Le traitement de l'image tente de rapprocher les deux, mais il ne peut pas inventer de la précision. L'Ultra HD met en exergue cet écart entre définition et résolution : on peut capter et visionner des images Ultra HD et s'apercevoir à l'examen que la résolution réelle n'est même pas digne d'une bonne image Full HD.


Pantom 3 UHD


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Taille

La taille des capteurs est l'une de ses caractéristiques les plus fondamentales, avec le nombre de photosites présents sur le capteur. Les deux sont évidement liés par ... la taille des photosites. Historiquement, l'utilisation de la pellicule pour enregistrer les images a défini des tailles plutôt grandes. L’avènement de l'électronique a permis de réduire très fortement les tailles, jusqu’à une miniaturisation extrême que l'on trouve dans les caméras de sport et les téléphone évolués. En dehors de ces derniers cas, l'exigence sur la qualité de l'image a relancé la course au "gros" capteurs. En vidéo, la taille des capteurs oscille entre 1/6" et le plein format (36 x 24 mm).


capteurs MV
schéma : © http://www.magazinevideo.com

La taille du capteur est fortement lié au nombre de photosites, avons-nous déjà vu. Par exemple, pour assurer une bonne captation en basse lumière, il faut des photosites d'au moins 5 microns de large. Or pour une image 4K, il faut 8192 photosites au minimum dans la largeur (et 4320 dans la hauteur), ce qui donne un capteur d'au moins 41 mm de large. C'est plus gros qu'un capteur plein format ! Il faudra donc trouver des compromis entre la résolution de l'image, les possibilités en basse lumière ou à des fréquences élevées, sans oublier le prix que l'acheteur est prêt à mettre dans cette qualité d'image. Pour les téléphones portables, c'est la résolution des images et la sensibilité qui a été sacrifiée à la taille, la vitesse et au prix. Pas sûr que ce compromis donne satisfaction aux amateurs de belles images cinéma !


Nous verrons ensuite que la taille du capteur, et donc des photosites, a une influence très importante sur sa consommation, sa vitesse d'acquisition, sa sensibilité et la profondeur de champ des images captées.


La taille du capteur a aussi une influence directe sur la taille de l'appareil qui l'utilise. Cela peut paraître évident, mais plus le capteur est gros, plus l'objectif qui est devant est gros. Même si les progrès en optique sont impressionnants, un gros capteur exige un gros objectif donc un gros caméscope, et un petit capteur se contente d'objectifs bien plus petits, compatibles avec une grande mobilité. Et non, nous ne verrons pas de capteur plein format sur nos téléphones portables avant longtemps...


Pour un objectif donné, la taille du capteur rapportée à celle de l'objectif implique un facteur de conversion de la focale. Si on prend comme référence, comme c'est souvent le cas, les objectifs plein format, la seule taille de capteur qui n'engendre pas de d'allongement de focale, c'est un capteur ... plein format. Dans le jargon, ce facteur de conversion entre la focale "plein format" et la focale réelle obtenue s'appelle le "crop factor" (facteur de recadrage). Son calcul est évident si l'on regarde le dessin précédent. Par exemple, un capteur 4/3 comme celui du GH4 engendre un crop factor de 36/17,23 = 2,1. Pour simplifier, on considère qu'un capteur 4/3 a un crop factor de 2, un capteur 1" a un crop factor de 2,7, un capteur "Super16" comme celui du BMPCC a un crop factor de 2,88, ça commence à faire beaucoup.


CropFactor
schéma : © http://4.bp.blogspot.com

Pour obtenir un angle de vue suffisamment large, il faut donc compenser par des objectifs à courte focale. Il sont certes de plus en plus répandus, mais pas encore très courants.


On retrouve le même phénomène de crop factor lorsque seule une partie d'un capteur est utilisée pour des raisons de vitesse. Nous reverrons ça dans le chapitre sur la vitesse des capteur, mais l'effet sur la focale est sensible : on perd l'intérêt d'un capteur de grande taille sur certains appareils comme le GH4 ou le DVX200, surtout en mode Ultra HD ou 4K, qui font passer le crop factor de 2 à 2,3. La stabilisation électronique peut aussi obliger à un recadrage sur le centre du capteur. Focale plus longue et perte de définition, c'est parfois le compromis à accepter pour une meilleure stabilité.



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Consommation

Un effet moins évident de la taille des capteurs est leur consommation. Pour faire simple, plus un capteur est gros, plus il consomme et donc plus il chauffe. Non seulement un gros capteur doit être alimenté par une source d'énergie puissante, mais il doit souvent être refroidi, surtout s'il est amené à fonctionner en continu. Et en vidéo, les capteurs sont par principe utilisés en continu : ils n'ont pas le temps de s'arrêter entre chaque image !


panel

La consommation est donc une autre raison qui explique la taille des appareils à gros capteurs : grosse batterie, circuit d'alimentation costaud, ventilation forcée éventuelle. Par exemple, les limites technologies actuelles sont bien illustrées pour le BMPCC : capteur assez gros, petite batterie et petit boîtier donnent une autonomie faible et une chauffe gênante.


BMPCC Batterie

On retrouve cette surchauffe dans certains APN à large capteur (RX100) qui limitent la durée de prise de vue pour ne pas endommager l’électronique. Les caméscopes professionnels, de leur coté, incluent une ventilation pour évacuer cette chaleur préjudiciable aux composants et même à la qualité d'image: plus le capteur est chaud, plus il génère du bruit électronique interne.


Et encore, l'arrivée du CMOS et de ses pistes électroniques façon processeurs à faible consommation a bien arrangé les choses. Un capteur CCD est encore plus consommateur que le CMOS, demande plus de refroidissement et plus d'alimentation.


Les petits capteurs sont très avantagés sur la consommation : pistes fines, photosites minuscules, faibles longueurs de circuits. Les faibles besoins énergétiques et de refroidissement, souvent passif dans ce cas, les mettent à l'aise dans les caméras de sport et les mobiles.


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Vitesse

Dans les caractéristiques d'un capteur, il y a aussi sa "vitesse". Pas celle de son déplacement, non. Mais celle à laquelle les informations sont transmises à partir du capteur. Un petit capteur permet un balayage plus rapide de l'ensemble des photosites, surtout s'il y en a peu. Cela permet aux appareils à petit capteur de proposer facilement des fréquences d'images élevées. Pourquoi un GoPro Hero4 se permet du 100 ips pour pas trop cher ? Car il sait balayer une partie de son petit capteur en un temps très court et traiter ces images à la volée. Pour faire la même chose avec un gros capteur, il faut multiplier la taille, le poids et le prix par plus de 10, par exemple avec un Sony FS700.


Hero 4
FS700

Avec un gros capteur, il faut se contenter de fréquences "classiques" ou mettre le prix dans une électronique de course, bien plus coûteuse. On a un bon exemple avec le DVX200.


Ce caméscope récent à gros capteur et haute vitesse propose une panoplie de fréquences d'image très liées à la quantité de pixels qu'il faut extraire du capteur. Le vrai 4K est limité à 24 ips, l'Ultra HD passe à 30 ips. Mais s'il faut passer en Ultra HD à 50 ips, une zone moins étendue du capteur est utilisée pour accélérer l'acquisition. On y perd le grand angle et de la résolution... Et pour pousser à 100 ips en Full HD sur ce gros capteur, une technique de regroupement est utilisée, diminuant la résolution. Cet exemple est intéressant car on comprend que le capteur 4/3 du DVX200 n'est pas assez rapide pour faire nativement des hautes fréquences d'image en très haute définition et que Panasonic l'a poussé dans ses retranchements pour répondre à la demande des vidéastes.


DVX200

La vitesse limitée à laquelle un capteur est capable de transférer les informations a un autre effet qui est apparu lors de l’avènement des gros capteurs CMOS conçus d'abord pour la photo. Le rolling shutter, cette technique de collecte dans les capteurs CMOS est devenue synonyme d'un phénomène visuel perturbateur. Dans les capteurs CMOS photo, la collecte se fait comme la fermeture d'un volet roulant sur une fenêtre, ligne par ligne. Ce n'est pas grave lorsque l'obturateur mécanique d'un reflex bloque l'arrivée de la lumière, mais c'est gênant si l'image continue à être captée pendant la collecte, comme c'est le cas en vidéo. La vidéo préfère en effet l'obturation "lente", par exemple au 1/50s pour 25 ou 50 ips. Au 1/50 à 50 ips, le capteur est toujours exposé.


MVI

La solution est d'utiliser des capteurs à obturation globale, dits "Global shutter". Ils collectent les informations comme la fermeture d'un store à lamelle sur une fenêtre : d'un seul coup sur toute la hauteur. Cela devrait être la règle en vidéo, mais ce type de capteur, moins répandu et plus coûteux génère aussi plus de bruit dans l'image. Encore un compromis à faire.


Les petits capteurs et ceux avec peu de photosites, qui collectent vite leurs informations sont très peu sujet au rolling shutter. Les capteurs CCD ont un processus de collecte différent qui évite tout rolling shutter, mais qui peut engendrer du "smear". Décidément, il y a toujours un défaut !



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Sensibilité

Nous avons déjà abordé le problème de la sensibilité des capteurs dans le chapitre sur la taille. Un capteur imitant l'oeil humain (c'est ce qui nous intéresse en vidéo) doit transformer en image numérique ce que nous sommes capable de voir. Or, la plupart des capteurs sont en difficulté lorsque la lumière baisse, alors que nous y voyons encore clair. En effet, en basse luminosité, le flux lumineux (nombre de photons) est insuffisant pour créer un courant électrique facile à interpréter. Les capteurs vidéo ne sont pas ceux des scientifiques, capables pour les meilleurs de détecter chaque photon entrant ! Lorsque le flux lumineux baisse, le caméscope augmente le gain, mélangeant le signal venant de l'extérieur avec celui, perturbateur, venant de l'intérieur, le bruit. Le rapport signal sur bruit s'écroule et l'image devient granuleuse, perd ses détails d'une manière aléatoire.


HM200 30 dB

Pour éviter ce bruit, la surface de captation doit être la plus grand possible pour collecter le maximum de lumière. On peut y arriver avec des objectifs à grande ouverture et avec des photosites de grandes tailles. La fameuse barrière des 5 microns (5 millièmes de millimètres) par photosite arrive ici. C'est une valeur habituelle et approximative, dont la pertinence dépend de la technologie exacte du capteur et de son ambition en basse lumière.


Nous avons déjà calculé qu'un capteur plein format est un peu petit pour une bonne image Ultra HD : pour aligner les 8192 photosites nécessaires à une image Ultra HD (3860 pixels de large) sur 36 mm, il faut qu'ils fassent 4,4 microns. Bon, on est pas loin des 5 microns, un capteur de bonne qualité de 33 Mp fera l'affaire.


Que dire maintenant de notre capteur de 1/2,3" de 12 Mp ? Chaque photosite fait 1,5 microns. La, c'est insuffisant pour espérer une belle image en basse lumière. Mais nous savons qu'en extérieur bien clair, cela suffit. Et si on voulait un vrai capteur Ultra HD (33 Mp) de cette taille, chaque photosite ne ferait que 1 micron. Pas facile à fabriquer et pas très utile, il faudrait un soleil dans le dos en permanence !


Nous voyons qu'il faut faire un compromis permanent entre la sensibilité et la résolution. Quand Canon équipe son XF200 d'un capteur 1/2,84" de 3 Mp, il fait le choix de la sensibilité (photosites d'environ 3 microns) pour rester compact. Cela donne des photosites plus gros et bien moins nombreux que le capteur 1"- 20 Mp de Sony (2,4 microns) qui lui fait le choix de la résolution. Mais quand Canon ou Sony veulent un capteur parfaitement adapté à la vidéo qui concilie la résolution et la sensibilité nécessaire à une très belle image Full HD digne de nos grands écrans, ils fabriquent un capteur Super35 8 Mp. Cela donne des photosites de 6,4 microns, donc sensibles avec quatre photosites par pixel. Bingo pour la gamme des EOS C et des FS700, F5, etc !


Eos C100

Avoir un grand nombre de photosites a quand même un avantage en terme de qualité d'image en basse lumière. C'est un peu paradoxal, mais lors de la phase de traitement du signal pour maîtriser le bruit, un plus grand nombre de photosites améliore la base des calculs. Mais ce n'est pas le capteur lui-même qui s'occupe de cette phase : c'est le processeur vidéo qui vient derrière qui s'en charge.



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Profondeur de champ

La profondeur de champ qu'il est possible d'obtenir dépend du capteur et de l'optique qui vient devant. Pour la part du capteur, c'est plutôt simple : plus un capteur est grand, plus il est possible de réduire la profondeur de champ. Mais dans ce cas, il est aussi plus difficile de d’augmenter cette profondeur de champ, donc d'obtenir toute l'image nette. Au contraire, un petit capteur permet d'avoir un grande profondeur de champ, mais obtenir de beaux arrière plans flous est plus difficile.


DSC0173

A l'utilisation, c'est parfois une vraie contrainte. Si la mode des faibles profondeurs de champ, typique d'une image "cinéma" a été favorisée par les gros capteurs des reflex, ces mêmes appareils sont peu à l'aise en situation "vidéo" ou il faut ramener des images avec un maximum de netteté. Sur un caméscope de sport, il n'est pas possible de faire le point, il faut donc un petit capteur pour avoir une zone nette la plus étendue possible. Mais impossible de faire des flous artistiques avec ce genre d'appareil !


DSC01654

Les capteurs de 1" semblent plutôt universels dans ce domaine avec leur taille intermédiaire, il sont donc à l'aise dans les caméscopes conventionnels pour les amateurs qui souhaitent varier les profondeurs de champ. Les capteurs 4/3 sont aussi à l'aise dans de nombreuses situations, même s'ils sont moins aptes aux grandes profondeur de champ que les "petits" capteurs.


Pour un capteur donné, c'est l'optique qui va permettre de moduler cette profondeur de champ : ouvrir l'iris (le diaphragme) ou augmenter la focale permet de diminuer la profondeur de champ, fermer l'iris ou diminuer la focale permet d'augmenter cette zone de netteté.


L'explication est là



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Évolutions

Les progrès sur les capteurs photo et vidéo sont encore nombreux. Par exemple, ces gros capteurs issus de la photo ont bien du mal à suivre le rythme de la vidéo, surtout dans les hautes fréquences d'image, mais ils progressent. La sensibilité native des capteurs devra aussi être améliorée. Les recherches sur d'autres capteurs de lumière très en pointe, les cellules photovoltaïques, pourront donner quelques pistes pour évoluer vers d'autres technologies que le CMOS tel que nous le connaissons actuellement. Car toute amélioration sur le compromis résolution/sensibilité et consommation/vitesse promet de nouveaux usages. Un caméscope de sport qui voit la nuit, c'est pour quand ?


photovoltaïque
schéma : © http://www.photovoltaique-couche-mince.com

Du côté des caméscopes plus imposants, quel est la solution aux contraintes actuelles ? Verrons-nous des triCMOS 1" en 4K (3x10 Mp) ? Il ne faut pas non plus oublier la piste des capteurs empilés de type Foveon. Certains appareils très plats, comme les téléphones évolués, explorent déjà la piste du multi-capteurs, ou plusieurs blocs optiques simulent un plus gros.


light caméra


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Conclusion

Les capteurs de nos caméscopes sont de belles pièces de technologie. Cette technologie tente de satisfaire des usages différenciés avec des compromis qui sont dictés par les lois physiques. Pas moyen de les ignorer, ces lois, pour satisfaire nos envies et laisser les commerciaux promettre des merveilles. Nous avons vu que la sensibilité et la résolution d'un capteur s'opposent. Suffit-il de faire des capteurs plus gros pour les réconcilier ? Non, la vitesse et la consommation, en dehors de l'encombrement, nous en empêchent. Le développement des capteurs va inévitablement ressembler à celui des processeurs, avec des progrès de plus en plus faibles. A nous de mieux en mieux utiliser cette technologie pour capter de belles images !



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