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Réaliser un film musical au népal

15 juin 2015 par Rémli Mezzina (auteur) / Thierry Philippon (entretien)


« Voyage sonore au Langtang » est un reportage de 54 minutes, qui retrace le voyage d’un musicien parti au Népal. Il s'agit d'une nouvelle aventure musicale à la découverte des sons et des cultures musicales de l'Himalaya. Nouvelle car l'auteur, Remi Mezzina, est reparti pour la seconde fois dans ce pays à deux ans d'intervalle, pour y réaliser un documentaire dont la musique et les sons du Népal sont les fils conducteurs.

Le credo de Rémi : partir à la découvertes des sons et des cultures musicales de l'Himalaya : au programme, musiques Chamaniques, folklore Tamang, ambiance sauvage Himalayenne, rencontre avec de multiples musiciens, Indiens, tibétain, bouddhiste, hindou, découverte d'instruments étonnants, échanges pédagogiques, etc.

Il faut dire que Rémi Mezzina est un passionné de musique et de transmission, diplômé d’études musicales en Jazz et composition électroacoustique du conservatoire de Nice. Il habite un village de l’arrière-pays Niçois.

Son film a été diffusé le 14 Juin 2015 à 21h sur Azur TV dans l’émission "l'oeil du voyageur". Le jeune réalisateur était présent sur l’émission pour parler du film, présenter des instruments et parler du Népal, ce pays qui vit actuellement des heures difficiles.

Népal

Côté vidéo, son premier film avait été enregistré avec des moyens vidéo modestes (un Pentax Optio WG-1) mais néanmoins probants. Cette fois, il a emporté un matériel vidéo un peu plus conséquent : un GH3, des trépieds et un Zoom H4N notamment.

Le réalisateur s'est prêté au jeu des questions / réponses pour mieux comprendre comment on réalise un documentaire de 54 minutes.

Népal

 

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Magazinevideo : Qu’avez-vous ressenti en apprenant l’info du 25 avril 2015 (NDLR : tremblement de terre au Népal) ? Avez-vous eu des nouvelles de certains protagonistes qu’on voit dans le film et si oui, comment vont-ils ?

Rémi Mezzina : La nouvelle m'a bouleversé ! Je suis resté plusieurs jours sans nouvelles de mes amis Népalais dont la plupart sont visibles dans le film, ce qui a été assez pénible à vivre. Enfin 15 jours après le premier séisme j'avais des nouvelles de tout le monde. Certains n'ont plus de maison / village et ont perdu des proches.

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MATÉRIEL / TECHNIQUE

 

MV : Votre équipement pour ce nouveau documentaire ?

R.M. : Pour ce deuxième projet vidéo, j'ai économisé pour m’offrir une caméra car jusqu'à présent je réalisais mes films avec un simple appareil photo de sport (Pentax WG1). Sur les conseils d'un ami photographe j'ai opté pour un Lumix GH3 au capteur Micro 4/3. J'ai aussi embarqué un caméscope de sport Panasonic HX-WA30 pour les prises type making off.

Rémi mezzina
Niveau trépied j'ai utilisé un "gorillapod" de 25cm. J'en avais même deux de rechange car ces petites "bébêtes" ne sont pas très solides. Je trouve néanmoins qu'elles offrent beaucoup de souplesse d'utilisation et sont peu encombrantes.
Olympus

Olympus 17mm f1.8

 

MV : Quels objectifs avez-vous utilisés ?

R.M. : J'ai surtout utilisé l'objectif Olympus M zuiko 14-42mm f3.5/5.6 qui m'offrait une optique de qualité couplée d'un bonne polyvalence grâce à son zoom et une compacité défiant toute concurrence.

Pour les basses lumières je changeais pour l'Olympus 17mm f1.8, moins souple en raison de sa focale fixe mais d'une magnifique qualité optique très lumineuse. Passé 18h, l'objectif ne quittait plus mon GH3.

Enfin j'avais dans mon sac à dos un téléobjectif Panasonic 100-300mm f4.0 / 5.6.
Je m'en suis servi aussi bien en ville qu'en montagne, toujours en mode stabilisé (intégré).

 

MV : Vous avez opté pour des réglages particuliers sur le GH3 ?

R.M. : Le GH3 était toujours réglé sur le mode "création de film" à une cadence de 50 images/secondes afin de me laisser la possibilité d'avoir de beau ralenti au montage. Je pilotais le tout en mode manuel car j'aime pouvoir choisir moi même l'ouverture, la vitesse d’obturation et l'iso.

 

MV : Etiez-vous satisfait de la qualité d’image du GH3 et pourquoi ce choix ?

R.M. : Parfaitement satisfait ! Le GH3 a été pour moi l'outil pratique et réactif dont j'avais besoin dans ces conditions de tournage en terrain d'aventure.

L'autofocus ultra rapide, l'excellente qualité de l'image et la compacité du boîtier est idéal pour les conditions de reportage. Couplé de l'objectif Olympus M zuiko 14-42mm f3.5/5.6 j'avais en mains un concentré de qualité et d'ergonomie. Enfin le GH3 est "tropicalisé", ce qui est un vrai plus en extérieur.

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MV : Et sur l'enrgistreur audio Zoom H4N, des réglages particuliers ?

R.M. : Mon Zoom H4n était réglé en mode "Stamina", c'est le mode économie d’énergie sans rétro-éclairage de l'écran et le minimum de fonctions afin d'économiser au maximum la batterie.

 

MV : Vous disposiez d’une petite torche ou autre chose ?

R.M. : Niveau éclairage, j'utilisais simplement ma lampe frontale.

 

MV : Combien d’heures de rushes à la base pour ce 54’ ?

R.M. : En matière de rushes vidéo j'ai recueilli environ 12h de film. Pour le son que j'ai capté séparément avec l’enregistreur manuel ZOOM H4n, j'ai eu environ 4h de rushes audio.

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MV : Quelle sensibilité (et / ou mode) pour les scènes de nuit comme celle à 10.07 ou 10.22 ? Cela fourmille très peu…

R.M. : Dans les conditions de basse lumière j'ai toujours utilisé mon objectif le plus lumineux, l'Olympus 17mm f1.8 diaphragme ouvert au maximum, vitesse d’obturation à 1/50 minimum et l'iso jamais plus haut que 1600. Au montage j'ai pu éclaircir encore certaines prises en jouant sur la luminosité & contraste.

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RÉALISATION

 

MV : Votre second film sur le Népal est bien mieux maîtrisé que le 1er. Quelle formation avez-vous suivie entre vos 2 films ?

R.M. : Entre ces deux projets, j'ai fait la connaissance d'un réalisateur de clip musicaux qui m'a ouvert sur le monde de la photo et conseillé le matériel adapté à mes besoins. J'ai ensuite étudié les notions de photo adaptées aux appareils reflex numériques grâce à un DVD emprunté dans une bibliothèque : "les réflex numériques". Ensuite j'ai beaucoup pratiqué moi-même et trouvé réponses à mes questions pratiques dans des tutos sur YouTube.

 

MV : Quelle est la part que vous consacrez à la documentation (sur les instruments par exemple) avant de partir ?

R.M. : Le travail de documentation a été assez sobre compte tenu du fait que j'ai plusieurs bon amis Népalais avec qui les discussions sont ma principale source de documentation et d’émerveillement.

Rémi mezzina

MV : Un film de 54 minutes est difficile à rythmer car il faut relancer constamment l’attention du spectateur. Avez-vous utilisé certaines techniques, suivi certains conseils, regardé d’autres documentaires pour trouver le bon rythme ?

R.M. : J'espère que le rythme est bon. J'ai mis beaucoup de temps à trouver son sens au film au vu de la quantité de rushes que j'avais et de la multiplicité des thèmes abordés. Le "dérushage" m'a aidé à sélectionner et organiser le récit. Mon idée initiale ayant toujours été de faire de la musique le fil conducteur de l'histoire, j'ai travaillé toutes les transitions dans ce sens et j'ai régulièrement sollicité l'avis de mon entourage.

J'aime beaucoup les documentaires jeunesse, je pense être influencé par ce type de travail.

 

MV : L’utilisation de votre propre voix off est-elle un « parti pris délibéré » ou un « choix contraint » ?

R.M. : Ce type de projet est totalement amateur, je n'ai donc aucun budget pour la réalisation, et le coût d'un acteur en voix off n'est pas dans mes moyens. Ceci dit, j'aimais assez bien le fait de pouvoir parler moi-même de cette aventure étant donné que j'y joue un petit rôle.

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MV : On vous voit dans pas mal de plans (sans en abuser) comme à 20.29 dans l’école, en auto-filmage apparemment. Quelle stratégie particulière pour réussir ce type de plans ?

R.M. : Certains plans sont en effet réalisés simplement en "auto filmage" avec le GH3 fixé au "gorillapod", et positionné dans la cadre qui m’intéresse. Dans ce genre de cas c'est de la mise en scène pour situer "l’action". Mais dans ce voyage, j'étais avec mon père. Il est donc à la caméra dans les situations où je joue de la musique avec d'autres personnes comme c'est le cas dans l'aéroport ou dans les écoles.

 

MV : Est-ce que la recherche sonore était une honorable « obsession » (comme la feuille à 27’40’’) ou est-ce que les « plans sonores » se sont imposés d’eux-mêmes ?

R.M. : Disons que je suis un passionné de musique. C'est mon métier et j'en fait depuis tout petit. Je suis donc très curieux de toute les cultures musicales et de l'univers sonore en général. C'est certainement une seconde nature chez moi que cette forme d'obsession envers tout ce qui sonne, qui vibre, qui siffle, qui résonne...

 

MV : Hormis l’école rattachée à l’association humanitaire que vous mentionnez, comment avez-vous « déniché » les protagonistes que l’on découvre dans votre film : le therapy musical ou le taxi musical par exemple ? Les mariés à 35’ ? Juste de la chance ?

R.M. : En effet, je ne suis pas parti avec la certitude de pouvoir réaliser mon projet de film car rien n’était planifié hormis le fait de partir randonner avec Lhakpa et le RDV avec les écoles. Sur place, les rencontres se sont faites naturellement, poussées par l'envie d'aller au contact des gens grâce au formidable média qu'est la musique.

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MV : Ce film est une ode à la beauté et ne comporte aucun aspect « négatif » ou même de simple constat de la dure vie des népalais. Est-ce délibéré, conscient, inconscient, imposé par le sujet ?

R.M. : En effet les conditions de vie au Népal sont assez dures mais il existe déjà beaucoup de reportages sur cet aspect. J'avais envie de focaliser l'attention sur la beauté et la richesse culturelle immatérielle de ce pays.

 

MV : Vous interrogez peu les gens à l’image, façon « entretien » comme dans Rendez-vous en terre Inconnue... ?

R.M. : J'ai voulu rester poétique et laisser la musique parler d'elle-même.

 

MV : Vous étiez accompagné de votre père (sur une partie du trajet ?) comme « assistant ». Pourquoi ce choix un peu inhabituel ?

R.M. : Mon père m'a accompagné tout au long du parcours. La montagne est une passion commune. On a découvert le Népal ensemble et cette fois-ci était une occasion de plus d'y aller tout les deux. C'est naturellement qu'il a pris part au film.

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MV : On peut avoir l’impression que les népalais jouent constamment de la musique. Si le thème de votre film n’avait pas été celui-là, est-ce que ces séquences musicales auraient été si présentes ? Formulé autrement, quelle est la part de « mise en scène » (au sens noble du terme) ? Par exemple à 43’13, votre guide joue pendant la cuisson des aliments… ça se passe réellement ainsi ?

R.M. : Au Népal la musique est présente au quotidien dans la vie des gens. Les enfants apprennent très tôt le chant à l'école ou au temple. Adultes, les moments de chanter ou de faire de la musique sont nombreux.

Les cultures religieuse du Népal sont sonores et utilisent une grande variété d'instruments pour les rituels et diverses cérémonies qui rythment la vie.

La chanson "Risham firiri" est connue de tous. Sorte "d’hymne à l'amour" Népalais, tout le monde la connaît par coeur et pour beaucoup de Népalais c'est leur chanson préférée. Oui, les Népalais sont très "musique".

 

MV : Est-ce qu’une diffusion telle que celle de Azur TV permet d’amortir les frais de voyage et de réalisation ?

R.M. : Les diffusions sur Azur TV sont bénévole set pour l'instant je n'ai personnellement retiré aucun argent de ce travail. Par contre le film a été programmé dans plusieurs festivals en "solidarité pour le Népal" afin de récolter des fonds pour les associations humanitaires oeuvrant sur place depuis le séisme et je suis heureux que mon travail puisse contribuer à aider les Népalais.

 

Entretien réalisé par Thierry Philippon. Captures d'écran et photos : © Rémi Mezzina

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